Les débuts laborieux du procès Ferrara

[maverick]

Lors de la première journée d'audience, les accusés ont multiplié les exigences. Quant à Antonio Ferrara, l'évadé de la prison de Fresnes, il affiche toujours un large sourire.
Un bras émerge du box sécurisé, coupant net la marche du juré tiré au sort. "Récusé!". L'homme en costume cravate, allure de pdg, rejoint le banc du public. Délit de sale gueule? L'accusé Antonio Ferrara tient à justifier son intervention: "Excusez-moi, Madame la présidente, j'ai eu un pressentiment". Le braqueur et as de la cavale se montre décontracté, fidèle à son image, affichant le même sourire éclatant à chacune de ses sorties judiciaires.

Les occasions de voir le jour se font rares. Ferrara passe sa vie entre quatre murs, dans des conditions carcérales particulièrement sévères. Il vit hors du monde, à l'isolement, à Fleury-Mérogis. Il se montre donc visiblement heureux de retrouver ses amis.

Ils sont 22 au total, dont 12 dans le box, considérés comme des pontes du grand banditisme malgré la jeunesse de la plupart d'entre eux. Ils sont accusés d'avoir mené ou préparé l'assaut contre la prison de Fresnes, à l'aube du 12 mars 2003, pour libérer leur ami "Nino". D'autres auraient donné le signal, comme l'avocat Karim Achoui, ou auraient protégé le fugitif dans sa cavale. La plupart encourent la réclusion criminelle à perpétuité pour "tentative d'assassinats" contre les surveillants de Fresnes: l'assaut, mené à coups d'explosif et de rafales de pistolets-mitrailleurs, avait en effet la puissance d'une expédition militaire.

L'un des avocats, Me Bernard Ripert, a multiplié les demandes, cherchant les incidents d'audience. Sans oublier au passage quelques pitreries oratoires, lui qui assimile les surveillants de prison aux forces de répression et compare les journalistes à des avocats généraux. A 17 heures, tout cela reste bon enfant.

Mais en fin d'après-midi, l'atmosphère se tend. C'est d'abord Antonio Ferrara qui, courtoisement, exige un stylo pour prendre des notes. Puis l'un des accusés se plaint, sèchement, du plateau repas "infect" et "froid" qui lui a été servi, exigeant que la présidente goûte à la nourriture.

Janine Drai tente de faire bonne figure, évitant tout incident qui pourrait différer ce procès hors norme. Elle fait même présenter ce plateau honni (de la dinde, de la salade et du fromage) aux jurés et aux avocats. Enfin, à l'autre extrémité du box, le frère d'Antonio Ferrara, Diego, multiplie les oeillades à ses amis et les intimidations aux journalistes. Il fait de gros efforts pour articuler. Sur ces lèvres, on lit aisément: "Ecris bien, bâtard".

Le procès, qui a commencé dans une ambiance laborieuse, se poursuit demain avec la lecture de l'ordonnance de mise en accusation. Au total, plus de 100 témoins ont été cités. Le verdict est attendu à la fin du mois de novembre.